Tanger
Portail du maghreb ouvert sur l'Espagne et son tourisme : "Hola, como estas? Espanol, Ingles, Français?" Meme les bambins connaissent ces mots. Ca fait drôle pour une fois, de se sentir blanc... De ne pas passer inarpercu, d'être le centre des regards.
Mais avant ca, la premiere chose qui me fait realiser que je suis bien au Maroc, c'est cette mobylette qui descend la rue à toute allure comme pour gagner chaque seconde. Amenagée et équipée de deux roues-avant et d'un caisson, elle porte toutes les cargaisons qui se présenteront et qui feront office de livraison, de travail. J'en avais vu de nombreuses fois en photo, mais celle-ci, elle pète et elle pue, c'est bien plus drôle.
Ici la vie est faite de commerce car le commerce fait la vie. Restaurant, bouiboui pour les plus chanceux. Vendeurs à la sauvette de cornets de cachuètes ou de patisseries. Vendeurs de cleenex pour femmes et enfants, cireurs de chaussures pour les hommes ou bien vendeurs de cigarette à l'unité. De quoi dire que l'on vend quelque chose et que l'on ne fait pas totalement l'aumone. La misère est connue de tous et celui qui a réussit a en échapper se prête au jeu, achète, rend ses chaussures un peu plus brillante, sorte de répartition sociale du tant bien que mal. Mais certain-e-s n'ont que leur main et leur yeux pour esperer avoir un peu d'argent.
Le quartier de la Medina est coloré par ses fruits, légumes et épices, mouvementé par sa foule et ses allers-retours. Il y a une énergie, une intensité. J'y sens une identité, une histoire. Les femmes, en contre-bas, étalent leur production a même le sol et c'est parfois, comme ce matin, avec un sourire chaleureux qu'elle me vendent le fruit de leur travail. On fixe le prix à l'aide de nos doigts et Sukran ! Les hommes eux, disposent de plus de structures : une petite charette, des corbeilles... Leurs produits sont aussi différents, ceux là ne viennent pas du jardin... C'est le quartier que j'affectionne le plus, j'y passe la majorité de mon temps lorsque je ne joue pas de guitare sur la plage. Plus haut se trouve la Kasba, l'ancienne ville avec ses petites rues étroites et ses enfants qui s'y faufillent en jouant.
Le reste.... et bien le reste c'est une ville, avec de grandes routes droites, remplies de vieilles voitures européennes. Elles ont attéri ici parce qu'on en avait besoin. Elle continue a deverser leurs gaz noirs et odorants. Nous ne pouvons que contempler et accepter notre erreur, nous ne pourrons jamais empecher (trouver un alternative efficace et applicable a) ce que nous nous sommes permis et ce que nous nous permettons encore aveuglement. A ce que nous brandissons encore comme un modèle. Les taxis eux, sont plus ecolo-économiques, rentabilisés au maximum : on se sert à 4 à l'arrière. Autour ce sont de grands immeubles carrés qui servent d'habitations. Les avis des Tangerois sont partagés : "Il ya tout ce que l'on veut", "il n'y a pas assez de travail" (7 millions de chomeurs m'a dit un marocain), "il y en a pour qui veut" - surtout si l'on sait être souple et mobile car j'ai rencontré deux jeunes qui travaillaient pour une société espagnol qui construisait ou entretenait l'autoroute entre Tanger et Agadir, en ce moment il travaillait chaque jours à 300km d'ici. On peut gagner de 20 à 70 dirhams (2 à 7 euros) par jour selon les travail. Le travail, véritable necessité qui conditionne l'existence. Ce qui m'inquiète c'est que hormis les enfants, je n'entends pas rire. Il n'y a pas de musiciens, pas de chants, un cinema qui n'a pas l'air très fréquenté...Je vois des Sysiphe porté des sacs de terre, de pierre ou des barres de fer à longueur de journée, parfois dimanche compris...
Les femmes sont majoritairement voilés. Celles qui ne le sont pas et trop coquettes, elles, jouent la sourde oreilles face aux réflexions constantes des hommes, ou bien font mine d'ignorer leur regard oppresant. Cela donne parfois lieu a des situations amusantes, comme cette femme voilés, mais maquillée, à talon, avec de belles lunettes de soleil et la mèche qui dépasse... Et il y a véritablement deux mondes : celui des femmes et celui des hommes. Rares sont les lieux ou les moments où je peux les voir ensemble...
J'ai rencontré deux francais hier soir qui partait vers le Mali, eux aussi. Nous sommes ravis parce que nous pouvons faire un repas de patisserries marocaine pour à peine un euro, accompagné d'un thé a 35 centimes. Je peux dormir en pension pour 5 euro. "Nous sommes nés du "bon" côté" pensons nous. L'inverse, est inimaginable... ou bien c'est un rêve, tellement compréhensible.
Demain matin, je retrouve Jean-Pierre au port et nous partons pour avaler les kilomètres, direction : le sud !